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Affichage des articles du janvier, 2020

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Writer’s Life (77) Samedi, entretien avec Myriam pour son site où elle interviewe des écrivains sur leurs pratiques d’écriture, leurs carnets. Comme je n’avais pas beaucoup dormi la veille, nous sommes allés rue du Sommerard. Au café de l’institut finlandais qui m’a toujours paru un endroit exquis, de l’extérieur, et qui l’est tout à fait. J’y retrouve une ambiance londonienne. Myriam me demande comment je vais. « Ça va », réponds-je. « Tranquille », me dit-elle. Je m’insurge tendrement : « Comment ça, tranquille ? Mais je n’ai pas été tranquille depuis, disons, 1989 ! Intranquille, tu veux dire ! » S’en est suivi une jolie conversation sur l’écriture, les poteaux qu’on évite et les râteaux qu’on se prend, Duras et Salinger, Sèvres-Babylone mon territoire de toujours, les cafés du quartier et le spectre de Loulou. Après-midi de lundi à écrire une chanson avec Naë, chez Roy Music. Inspirés, alertes et percutants. Au café où je relis les épreuves d’Alcie (quelle joie que ce livre, illu

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Writer’s Life (76) La fin du monde, abandonnée en pleine rue, sur un plot. La fin du monde à la merci de tous. La semaine passée fut intense : mardi ateliers d’écriture à Nancy, mercredi à Paris conférence de presse du Printemps du livre de Montaigu, jeudi retour à Nancy pour les ateliers d’écriture, et vendredi Paris pour la soirée littéraire au château de Maffliers. Je jongle avec les horaires de train, et ça risque d’être comme ça la semaine prochaine. Comme ça - avec toutes les sollicitations et les projets - jusqu’en juillet. Mais j’avance, je prends des notes, dans mon désir/projet de prochain roman. Le livre s’affine dans les interstices, s’écrit dans les heures transitoires. Même sans écrire, s’écrit. Quel bonheur que ces échanges autour de « La petite sonneuse de cloches » au club de lecture du château de Maffliers. Ça fait du bien de se savoir lu et apprécié avec ferveur par de grands lecteurs pour un livre qui a quand même eu moins de retentissement que j’en espérais. Enfi

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Writer’s life (75) Interview de Nabokov en 1959 : « What contemporaries do you value ? Sartre ? Faulkner ? », il répond : « They are not artists ». Ah, ah, parfait ! À la question suivante : « Salinger ? », il dit : « A great, wonderful writer. The best American novelist ». Je bondis de joie chaque fois que Nabokov loue l’écriture de Salinger. Ce sont mes deux grands manitous. Alors quand la dent dure du premier encense la grâce du second, je suis aux anges. Ça me fait penser à une particularité qui est la mienne depuis l’adolescence : quand il y a deux personnes que j’apprécie, j’essaie de les présenter l’une à l’autre en espérant qu’elles aient un coup de foudre réciproque. C’est aussi pour des raisons pratiques. Quand vos amis deviennent entre eux les meilleurs amis du monde, ça vous permet d’avoir la paix et de vous concentrer sur vos trucs. Les choses qu’on ne peut partager avec quiconque et qui remuent tout le temps. Qui trouvent une place décente dans la création. Dans mon livr

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Writer’s life (74) Clara me dit : «Je suis abonnée au compte Instagram de plusieurs écrivains et ce qui m’amuse et me désole à la fois c’est qu’ils agissent comme si la sortie de leur livre était un événement mondial, attendu par la planète entière en général et la littérature en particulier ». « Oui, réponds-je, mais c’est tellement difficile parfois de mener un travail d’écriture qui nous rende heureux, et les répercussions paraissent ensuite tellement dérisoires, il faut avoir un moral d’acier, alors une fois que le travail est fait, il faut bien y croire un peu pour soi, c’est la moindre des choses.» Au Pause Café avec Élise. Elle me parle de son job alimentaire (plutôt sympa) d’animatrice dans une salle d’Escape Game. Elle me dit que c’est très fréquenté, à toute heure. Je lui demande si des couples y vont. Élise me dit que non, c’est plutôt des groupes. Ah, c’est étrange, lui réponds-je, j’ai toujours vu le couple comme une tentative désespérée et perpétuelle d’escape game. Maste

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Writer’s life (73) J’adore, cautionne et valide tellement, cette phrase de Nabokov sur la création littéraire dans une interview pour Nice Matin qui date de 1961 : « Creation isn’t a discipline. It’s a state.» Toute la semaine à peaufiner le tome 2 d’Alcie avant de l’envoyer aux parties concernées (mon éditrice, Fred). Travaillé parallèlement à deux trois commandes de chansons. Création toute la matinée puis je passe une partie de l’après-midi dans la grande salle de la bibliothèque Stanislas où je relis scrupuleusement ce que j’ai fait le matin, changeant un mot, une tournure, revenant scrupuleusement comme une abeille sur le travail du matin. Lors de mon premier atelier d’écriture un étudiant me dit : « Vous faites plus vieux que sur la photo affiché dans les couloirs de la fac » (il y a toujours des provocateurs !) « Oui, lui réponds-je, mais ça ne vous est pas venu à l’esprit que la photo avait peut-être été prise avant que vous ne me rencontriez ? » Interview pour la radio. On me

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Writer’s life (72) Dans les messages de bonne année, chaque fois que j’écris : santé, amour, bonheur etc. De manière irrésistible, j’ai envie de mettre amour avec un s. Testé le renouveau des paquets de Treets. Aussi parce que j’ai pensé au mot de Nabokov (que j’adore) qui déclare dans un Apostrophes de 1975 que pour retrouver la sensation de son enfance il faudrait reconstruire à l’identique les chocolateries de 1901. Les industriels et les services marketing chez Treets ne sont pas nabokoviens. C’est bien Treets. « À l’identique » est la règle d’or. Les nouveaux paquets sont orange et non jaunes comme jadis, le chocolat qui enrobe les cacahuètes moins au lait qu’à l’origine, rien ne va comme il aurait fallu car rien n’est à l’identique. Ça met du factice sur les souvenirs. Après, rien n’est jamais à l’identique. Si vous passez un moment exceptionnel avec quelqu’un (on n’est jamais à l’abri de ça), et si cette personne souhaite ensuite vous faire vivre ce moment à l’identique, vous sa