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Affichage des articles du août, 2021

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  Writerslife (192) Ma tante Christiane a vécu la dernière partie de sa vie dans un deux-pièces modeste en rez-de-chaussée, dans un petit lotissement d’Etterbeek. Quand elle fut la dernière des Collas a être de ce monde, j’allais lui rendre visite une journée tous les 2 mois, je prenais le Thalys, et je me souviens un jour de grève être allé à pied jusque chez elle juste pour le déjeuner, depuis la Gare du Midi en passant par l’interminable chaussée de Wavre, aller-retour plutôt onirique sous la bruine. La soeur de ma maman avait tenu un temps un magasin de disques avec son conjoint, et l’affaire avait péréclité, elle vivait depuis avec une retraite de la taille d’un dé à coudre. Du vivant de ma mère, on lui envoyait des tas de colis pour Noël. Des vêtements chauds (en hiver elle ne mettait pas le chauffage par souci d’économie) et des livres, beaucoup de livres, car la fiction fait disparaître le temps trop pesant des jours successifs. À chacune de mes visites, je continuais à lui...

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Il y a quelque chose d’important dans l’écriture qui requiert de la clandestinité. Il y a un moment où l’écriture vous rend clandestin à la journée des autres, aux préoccupations des autres, aux salaires des autres, aux amours des autres. C’est comme ça. J’ai écouté l’émission du Masque et la Plume et leur diatribe particulièrement inutile et suffisante sur le dernier livre de Virginie (Grimaldi). Mener à terme un travail romanesque est déjà un tel territoire de doutes et d’efforts qu’en + il faut se farcir la grêle lapidaire des grincheux, soit. Juste après, j’ouvre le livre de Colum McCann (qui j’imagine a plutôt bonne presse au Masque et la plume) intitulé « Lettres à un jeune auteur » et dans les premières lignes on peut lire : « Ne crains pas les sentiments, même taxés de sensiblerie », tout ce qui est reproché à Virginie. L’un des commentaires sur IMDB à l’excellente série « Physical » (la seule série qui m’a happé cet été, il faut aussi avouer que je suis assez dingue de Rose By...

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  Writerslife (190) Aujourd’hui c’est l’anniversaire de naissance de ma maman. Les dernières années, je l’emmenais chaque 24 août au bord de la mer, pour la journée. Elle me disait toujours : ça n’a aucune importance où tu m’emmènes du moment que je suis avec toi. Je bottais en touche, par pudeur. J’ai essayé de m’occuper d’elle au mieux, le plus de temps possible, les dernières années de sa vie, deux trois fois par semaine, précipitant parfois mes départs de sa maison puis du petit appartement qu’elle a loué la dernière année pour des projets qui n’en valaient pas la peine, qui ne me mèneraient nulle part, ou pour des gens qui me faisaient perdre un temps précieux pour rien. Aujourd’hui, j’aimerais pouvoir penser à ma mère. Convenablement, un peu. Retrouver des moments. Sans que cela me rende trop triste. Revivre des segments, des instants, en pensées ou en rêve. Je fréquente beaucoup de personnes qui ont encore leurs deux parents, au moins un sur les deux, est-ce que cela teinte ...

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  Bien sûr, quand vous écrivez, tout ce qui arrive et ne semble pas trouver sa place dans le roman vous paraît totalement invivable. Dans un livre j’aime faire en sorte qu’il y ait au moins deux ou trois phrases bancales, qui ne veulent pas dire grand chose mais qui ont beaucoup de potentiel. En tant que lecteur ou spectateur s’il s’agit de cinéma je préfère d’ailleurs les oeuvres qui ont du potentiel, plutôt que celles qui prétendent m’écraser par leur perfection et qui, au bout du compte, ne m’ont donné aucun élan pour, à mon tour, mettre la main à la pâte. Les gens qui commentent un travail littéraire doivent savoir qu’ils commentent aussi un combat entre la vitalité et la fatigue, la clarté et le doute, le crucial et l’inutile, l’amour et le désespoir. Une jolie fille, dans le train. Quand elle baissa son masque pour boire au goulot d’une bouteille en plastique son visage se nimba de quelque chose de dur et de spectaculaire. J’emportais son visage dans ma tête en fermant les ye...

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  Writerslife (187) Des conversations très intéressantes avec Sandrine. Finalement, il y a peu de personnes avec lesquelles vous pouvez avoir des conversations intéressantes. La plupart du temps vous écoutez les gens parler et vous pensez à tout à fait autre chose, un visage aperçu et qui n’a pas encore disparu de la surface de vos préoccupations, ou une personne que vous connaissez depuis un certain temps et qui vous obsède en secret. Ce genre de choses. Et pendant ce temps-là, vous laissez les gens parler. Enfant, je redoutais + que tout les soirées diapos. Les voisins, les amis des parents, ils voulaient tous vous prendre à témoin des paysages, des lieux extraordinaires qu’ils avaient le privilège d’avoir visités. C’était vraiment barbant. Je ne savais jamais comment m’en dépêtrer. ils avaient tous une soirée diapos en prévision. Je pensais y avoir échappé, et puis Instagram est arrivé. Comme quoi, toute fuite est inutile. Le premier été après la mort de ma mère, j’ai ressenti u...