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 J’ai accompagné une jeune femme ukrainienne et sa mère dans le dédale des rues de Montparnasse jusqu’à la gare où un train l’attendait pour Poitiers. Elle me raconte en anglais comment dès février le village qu’elle habitait proche de la frontière russe a été bombardé. Les vitres qui volaient en éclat, soudainement. Elle me dit : C’était inimaginable, et maintenant je sais que ça peut arriver à tout moment. Elle a trouvé refuge en France avec sa mère et son fils de un an, et loue un petit appartement à Poitiers. Elle parle vite, me raconte pleine de choses et nous cavalons dans les rues au rythme de nos paroles dans un anglais peu habile mais suffisant pour nous comprendre. Sa mère nous suit derrière, une toute petite femme timide. Parfois, je ralentis pour que sa mère puisse suivre la cadence des mots et des pas. Nous continuons à parler de l’horreur de la guerre, et, pour apporter un peu de sourire, de la laideur de la tour Montparnasse qui se profile devant nous. Je les quitte devant la gare et garde longtemps en mémoire après cette conversation haletante la distance que gardait ou qu’essayait de combler cette petite femme qui nous suivait.

Enregistrement de voix pour mon disque chez Olivier (M) dans son petit home studio sous les toits. Nous parlons des milieux artistiques et Olivier m’apprend que son grand-père lui disait toujours : « il ya ceux qui bougent, avancent, et ceux qui s’agitent. Ceux qui ne font que s’agiter foncent vers la noyade. » J’ai trouvé ça très juste. Aujourd’hui j’ai l’impression que beaucoup ne font que s’agiter.
Au salon du livre de Boulogne, la bénévole qui a observé les échanges avec les personnes qui viennent chercher mes livres, s’approche et me dit: « Il y a beaucoup de passion entre vous. De part et d’autre, j’ai remarqué, beaucoup de passion »

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