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Writer’s life (59)
Quand je n’écris pas une journée c’est que je suis dans un état de profonde tristesse, une tristesse qui me paraît indéchiffrable aux autres, incompréhensible pour les autres, intransmissible, dans la mesure ou écrire c’est chercher à se rendre compréhensible (d’une seule personne ou/et du plus grand nombre). Écrire, c’est déjà permettre à cette tristesse de sortir de soi, de prendre l’air, faire quelques pas dans le jardin, d’aller chercher un peu de résonance dans le coeur de la personne qui lit. Écrire, c’est arrêter de mettre les autres dans le même panier. C’est se dire qu’il existe quelqu’un pour comprendre vraiment de quoi il s’agit. Une personne qu’on connaît ou qu’on n’a pas encore rencontré. Et même si cette compréhension sera démentie par la suite. C’est du moins miser sur une compréhension réelle. Déjà, dans l’acte d’écrire, elle est là. Quand je n’écris pas dans une journée, je disparais au monde parce que je suis trop sale ou saturé (de tristesse) pour paraître. Mon cœur et ma vision, brouillés de larmes. Quand je n’écris pas, aussi et c’est heureux, c’est que je suis dans les bras d’une personne qui me plait, mais la plupart du temps c’est que je suis enveloppé de chagrin. L’écriture est ma mesure. Ma résistance aux intervalles. Elle fait de moi un être optimiste alors que ma sensibilité contrarie cet élan. Elle peut être un mensonge transmissible fabriqué à partir d’une vérité intransmissible. En fait, quand tout mon être est réduit à une profondeur, une impossibilité, ou une vérité, qui me paraît intransmissible par la parole, c’est que je suis mûr, tout est en place, pour l’écriture d’un roman.

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